Bestia

Rien ne sert de courir, il faut réserver à point. Trois mois en avance précisément, pour une table de quatre un samedi soir. Bien sûr, quelques chanceux profiteront d’une annulation (le malheur des uns fait le bonheur des autres) pour sauter sur une table au bar à 23h. Et pour cause, Bestia est un incontournable de Los Angeles, au même titre que Hollywood Boulevard ou le Double-Double Animal Style — certains diront que c’est overrated, mais il est impossible de passer à côté. Overrated ? On n’y croit pas. Un seul agnolotto suffit à nous convaincre, avec sa queue de boeuf braisée et son goût rustique de cacao qui embaume nos narines avec encore plus de puissance que les Mast Brothers mitoyens. Les spaghetti rustichella, aux oursins, ont un arrière-goût marin, comme si le Grand Bleu avait été tourné en Adriatique. Le pâté de foie et les gésiers rappellent le parcours du chef Ori Menashe, élevé en Israël avant de faire ses classes chez Angelini Osteria et Pizzeria Mozza. Le blockbuster de la maison est sans le moindre doute la moelle rôtie et servie avec des tout petits gnocchis aux épinards et une sauce corsée, presque caramélisée, au balsamique. Côté boissons, on est bien entouré avec le sommelier Ryan Ibsen qui saura vous raconter des histoires de bouteilles jusqu’à plus soif. Pendant que les pizzas de la table voisine se font dorer la pilule dans l’immense four à bois, on jette son dévolu sur les desserts préparés par Genevieve Gergis, l’épouse du chef et non moins co-propriétaire de Bestia. Un budino fort en chocolat qui rappelle celui de Nancy Silverton (fini ici avec un trait d’huile d’olive et de la fleur de sel), un zeppole frit minute avec une glace au café, ou une autre assiette de Pici al Sugo di Agnello parce que c’était tellement bon qu’on en voudrait encore.